Blog

Conférence : J.-P. Pinchon, animateur des fêtes de Jeanne d’Arc à Compiègne de 1909 à 1930

vendredi 20 mai 2016 à 20H30

Dès leur création, Pinchon fut invité par le comité organisateur à participer à la célébration de l’héroïne que le Vatican venait de béatifier. Sa qualité de dessinateur des costumes de l’Opéra le désignait auprès de ses amis compiégnois pour réaliser les maquettes des costumes d’époque et les bannières du défilé historique. Il produisit encore affiches et cartes de collection. Toutefois sa participation ne s’en tint pas aux préparatifs de ces fêtes. En effet, il prit part lui-même aux défilés historiques successifs incarnant chaque fois un compagnon d’armes de Jeanne. Il est l’auteur de la fresque murale de l’église de Clairoix représentant Jeanne d’Arc sur le mont Ganelon.

 

3e conférence de Bernard Lehembre

Monsieur Lehembre nous a parlé du rôle joué par J.P. Pinchon pour les fêtes de Jeanne d’Arc au début du XXe siècle. Il nous a lu le compte-rendu qu’en a fait le Courrier de l’Oise le 1er juin 1911, compte-rendu que nous partageons avec vous.

 

Le courrier de l’Oise du jeudi 1er Juin 1911

Le Journal des Débats

Compiègne encore une fois, a voulu racheter le crime autrefois commis contre la vierge guerrière. Elle a pleinement réussi, et l’âme de Jehanne a du tressaillir d’émotion lorsque Mme la duchesse de Vendôme qu’accompagnaient la princesse Marie-Louise d’Orléans, sa fille aînée, la comtesse Yolande de Börchgrave d’Atena, Mme la duchesse d’Uzès, S.A.R. le comte d’Eu et la princesse de Ligne, vint déposer au pied de la statue une palme d’argent barrée d’un ruban bleu et blanc.

Cependant, voici qu’au loin chantent doucement les fifres, claironnent les trompettes et roulent les tambourins. C’est le cortège qui s’avance, un cortège long de près d’un kilomètre et groupant près d’un millier de figurants ; jamais au cours d’une cavalcade française on n’avait pu admirer d’aussi merveilleux costumes et d’une reconstitution aussi parfaite, des armures aussi étincelantes ; des panaches aussi altiers ; ils défilent, les musiciens coquets, leurs manteaux bleus et blanc ; les gardes à cheval gainés de cuir, les artilleurs mi-partis noirs et mi-partis marrons, les attournés, de velours noir vêtus en imposants chevaliers, les demoiselles du Mai fleuri au hennin tapageur, voisinant avec les vieilles paysannes dont les rides se cachent sous le blanc bonnet aux longues brides ; la guivre de la forêt de Compiègne, proche parente de la tarasque provençale, aux yeux articulés at aux écailles livides, et tous les seigneurs richement costumés : le Jehan d’Avesnes (M. Landolt) sur sa haquenée somptueusement caparaçonnée d’or, le roi d’Armes (M. de Jumilhac) de brocard et de pourpre habillé et coiffé, aussi majestueux que naguère. Il fut un Charles VII nonchalant, et tous les nobles sires de fer bardés, portant brillamment des manteaux tissés d’or à la vénitienne, et des cimiers superbes, où se s’éployaient des aigles et des vautours, des cygnes et des plumes de paon ; voici encore les dames de la cour en litières et en carioles, et le duc de Brabant (M. Pinchon) drapé de velours et d’or, et des mulets chargés de provendes et d’ors. Dans l’éclaboussement du soleil, les costumes resplendissaient et irradiaient pour le plaisir des yeux.

Dans la lice, que des tribunes barrent des trois côtés, et que prolonge le camp joyeux où des gonfanons rayés de blanc et de bleu claquent au vent, le cortège a pénétré aux vivats de milliers de spectateurs.

La marche d’Athalie scande leur marche, et soudain monte vers le ciel pur un chant très doux emprunté à une chanson de Charles d’Orléans ; vielles, cornemuses et fifres accompagnent harmonieusement les voix et c’est toute une évocation d’un âge charmant disparu.

Mais le roi d’Armes escorté des maréchaux de la lice s’est incliné devant les nobles dames. Les joutes vont commencer. Après le despartement (nos engagements modernes) et la recommandation, qui permet aux dames de désigner leur chevalier qui leur aurait manqué quelque jour, le roi d’Armes rappelle aux combattants les lois de l’honneur et de leur gantelet de fer les chevaliers jurent de s’y conformer.

Dés lors les joutes succèdent aux jeux et les jeux aux joutes ; Jehan d’Avesnes terrasse la Guivre qui avait fait fuir les dames dans un châtelet (le behourt) hâtivement élevé dans la lice, mais n’obtient pas de reddition de la place qu’après l’avoir bombardée des ses couleuvrines et avoir donné l’assaut avec ses archers. Les chants moyen-âgeux alternent avec les chants pour la joie de l’ouïe ; puis c’est la bataille «Coupez les cordes et hurlez batailles tant que vous voudrez» a clamé le roi d’armes. Les épées ou les masses d’armes font résonner les armures, les velours se choquent aux velours, les brocards aux brocards, jusqu’à l’heure où le vainqueur recevra des mains de la présidence la chaîne d’or de St-Georges.

Toute cette reconstitution fut vivante, exacte ; nous avons vécu une époque avec son ambiance et son charme, et souvent nous pouvions nous demander si nous étions éveillés, si ce n’était pas un rêve. Rendons-en grâces à Monsieur fournier Sarlovèze, le magicien, et à ses dévoués collaborateurs. Ils été à la peine et furent largement à l’honneur.

Partagez l'information autour de vous

Un commentaire pour “Conférence : J.-P. Pinchon, animateur des fêtes de Jeanne d’Arc à Compiègne de 1909 à 1930

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.